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« La problématique agricole n’est plus centrale » dans les élections

Pour le politologue Eddy Fougier, les partis politiques accordent peu de place aux questions agricoles dans la campagne des élections législatives.

Pour le politologue Eddy Fougier, les questions agricoles ont peu de place dans cette campagne des législatives. La faiblesse des partis ayant habituellement la préférence des agriculteurs ajoute beaucoup d’incertitude quant à leur choix dans les urnes.

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Avec les sondages avant élection chez les agriculteurs et les résultats aux européennes, que peut-on envisager pour les prochaines législatives ?

« C’est assez difficile à dire car si les agriculteurs votent sur des considérations agricoles, ils ont aussi un vote pragmatique. C’est-à-dire que pour beaucoup d’entre eux, ils vont favoriser les listes qui sont susceptibles d’arriver au pouvoir. Nous sommes donc dans un cas particulier car les listes qui ont généralement leur préférence comme Les Républicains ou Renaissance, ne sont pas très bien placées. »

« Nous nous retrouvons face à deux blocs qui ne sont pas la tasse de thé habituelle des agriculteurs. Pour une majorité d’entre eux, le programme et la perspective de voir le Nouveau Front populaire au pouvoir seront plutôt un repoussoir. Mais leur choix entre la vieille maison LR, Renaissance ou le RN reste une inconnue. »

L’agriculture était au cœur des débats au début de l’année, mais le sujet a perdu un peu de souffle. Qu’en est-il pour ces législatives ?

« Nous revenons à une situation disons, classique. Certes, il y a eu les mouvements agricoles du début de l’année et les problématiques de l’inflation alimentaire qui ont beaucoup intéressé l’électeur moyen. Mais aujourd’hui ces sujets sont un peu moins perceptibles dans la tête des uns et des autres et en conséquence, la problématique agricole n’est plus centrale et donc pas prioritaire pour les partis. »

« L’écologie n’est pas non plus mise en avant mais pour des raisons différentes. Il y a une prise de conscience que les discours habituels vers le grand public, plutôt catastrophistes ou bien culpabilisants, sont inefficaces, voire contre-productifs pour convaincre de changer de comportement. Il y a donc une forme de prudence, notamment depuis les contestations agricoles et le soutien massif de la population envers les agriculteurs qu’elles ont suscité. »

Comment ces tendances se traduisent dans le programme des partis politiques engagés dans ces législatives ?

« Sur les questions de l’agriculture et de l’alimentation, c’est toujours compliqué parce qu’en fonction de leur ligne générale, les partis politiques s’orienteront, soit sur le vote des agriculteurs, soit sur celui des Français. Pour simplifier, la gauche ne cherche pas à mobiliser les agriculteurs mais plutôt les électeurs moyens citadins qui sont préoccupés par le climat ou la santé. Sa position sur les pesticides en est un exemple. C’était d’ailleurs le programme habituel de LFI et même d’Hidalgo ou de Jadot à la présidentielle. »

« Du côté des Républicains, c’est l’inverse. Ils développent un programme agricole qui s’adresse d’abord aux agriculteurs. Pour le RN, ce sera le patriotisme économique et puis le rejet d’une écologie dite punitive. Mais je ne suis pas certain qu’à ce stade, l’agriculture soit leur priorité. Ni celle de Renaissance, qui va tenter de sauver les meubles. »

Plusieurs textes agricoles étaient engagés pour cette mandature comme ceux sur la simplification ou la très attendue loi d’orientation agricole. Quelles sont les conséquences de la dissolution pour le monde agricole ?

« Il y a deux aspects à noter. Le premier c’est la période d’incertitude dans laquelle nous venons d’entrer. Des négociations et accords tacites avaient été mis en place entre le gouvernement et la FNSEA et JA, et tout s’est arrêté. Or les agriculteurs comme tous les acteurs économiques ont besoin a minima de visibilité et de stabilité. »

« L’autre aspect, c’est l’issue très incertaine de ces élections. À ce stade, les scenarii les plus probables sont soit le RN avec une majorité pour former un gouvernement de cohabitation, soit le Front populaire, et ça change du tout au tout. Enfin, on peut avoir aussi le scénario où aucune majorité ne parvient à se dégager à l’Assemblée nationale. Il y a donc un sentiment de roulette russe vis-à-vis des processus législatifs enclenchés. De plus, le programme économique des blocs favoris n’est à mon sens pas de nature à rassurer les agriculteurs. »

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